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Articles

Mes chers petits rats, par Martin Chabert

Ça y est. Ça reprend. Est-ce que ça a ou est-ce que ça vient de reprendre ? Comme si ça m’attendait. Ça n’attendait que moi. Je ferme les yeux, et je ne sais plus très bien, si ça se rapproche ou bien si c’est moi qui l’attends. Je veux dire, non seulement ce bruit qui revient sans arrêt et qui n’a pas finit de me casser les oreilles, mais encore autre chose, derrière : une sorte de biscuit qu’on me grignoterait directement dans le conduit auditif.  Dans une telle situation, naturellement, on pense d’abord à un rongeur, peut-être une souris, avec son museau humide et l’allure craintive de ses petites pattes de devant. Est-ce que j’avais déjà eu des souris chez moi ? Plutôt un rat ou deux, enfant. On précisait : domestiques, mais y a-t-il vraiment une race différente pour les rats domestiques ? Certainement. De toute façon, on s’en était vite débarrassés.  On avait d’abord songé les confier à une espèce de gothique qui m’avait entendu en parler au rayon...

La scène du baiser, par Emmanuelle Hardy

vous passez, vous passez ça ne m'intéresse plus au début un peu mais maintenant ça fait des années mille fois j'ai vu la scène du baiser au milieu des poubelles débordant des reliefs du jour et de la nuit devant les flics avec leurs chiens comment peut-elle être encore touchante la scène du baiser je regarde toujours quand il y a une scène du baiser le reste, imaginer quelles villes, quels boulots, quels voyages se cachent derrière les gens qui passent ça ne m'intéresse plus vraiment elle elle entre dans la gare par le bout du quai A comme le train de la Ciotat elle remonte doucement le courant je la vois qui remonte le courant elle s'arrête parfois et demande un double je ne suis pas sûr d'avoir bien entendu est-ce qu'elle veut un double son regard s'est déjà vidé elle dort dans sa carcasse Là-bas au bout il y a le ciel mais je ne le regarde plus Pas plus que vous Où allez-vous Vous passez Il n'y a nulle part où s'arrêter de toute façon Les chaises ...

Dans le miroir, par Martin Chabert

dans le miroir un camion déformé aplati surgit lentement à l’intersection dévoilant lentement un panneau une indication un peu tordue au niveau de la flèche le métal rappé difforme peut-être un camion l’a-t-il embouti peut-être intentionnellement comme une correction après coup comme une demande de changement de direction le gravier du gravier sur le béton le gravier formant des petits tas sur la chaussée brusquement évités ou découverts trop tardivement dans un sursaut dans le fracas des vitres à en retirer sa tête le tronc chétif la multitude de troncs chétifs aux feuilles comme des doigts palmés qui remuent entre les deux voies rapides où tombent une à une les figues minuscules et vertes qu’on ne prend pas la peine d’éviter oh si elles étaient bien rouges et molles il y aurait du jus qui sortirait comme un épais sirop du petit trou qu’il y a sous elles alors on pourrait trouver plaisir à rouler dessus quitte à salir ses pneus (peut-on tâcher un pneu?) en attendant elles s’amoncellen...

De part et d'autre des platanes, par Martin Chabert

de part et d’autre les platanes droits comme des poteaux  des pierres blanches assombries par l’heure quelle perspective s’offrait à lui cela se perdait  se heurtait quelque part façade grise  béton mal aplati diverses croûte  une jante salissante quelques ombres qui se percutent  elles s'avancent lentement parmi les objets sans obstacle s’arrêtent  au sol comme une tasse de café qui se répand  au bout de la rue là où la rencontre va avoir lieu  la façade grise comme blanchie maintenant nettoyée à mesure soudain un chat au sommet d'une clôture cossue attend droit comme un platane les nuages au-dessus il va pleuvoir déjà le chat n’est plus là la rue est vide  le bâtiment au crépis approche les nuances de gris apparaissent la rangée de petits poteaux  une ouverture une fermeture une ouverture je suis en avance  la voiture se gare le chat qui m’a suivi j’ai eu un petit accident

A propos de ce blog

Ce blog entend donner un lieu de publication aux textes écrits par les participants des ateliers d'écriture animés par Martin Chabert pour l'association Arutam . Vous pouvez retrouver toutes les informations sur les ateliers en cours sur le site ecrireavec.com . Afin de soumettre un texte à publication , veuillez vous assurer : >>> que le texte est bien issu d'un atelier, >>> que l'orthographe et la ponctuation ont bien été revus et corrigés, >>> que le texte respecte les limitations de la liberté d'expression.    Vous pouvez ensuite soumettre votre texte en format texte (et non .pdf) à l'adresse martin@ecrireavec.com . Dès acceptation, il sera publié tel quel  et retiré du blog sur simple demande. Martin Chabert vit à Marseille où il se consacre à l’animation d’ateliers et à l’écriture. Il coordonne les activités culturelles et artistiques de l’association Arutam depuis sa création en 2019. Ses différentes expériences d'ani...