Ici, il n’y a pas d’errance, pas de révérence.
En pente, il fait 40°tous les jours, qu’il vente, qu’il pleuve ou qu’il neige.
Regard droit, tourné vers l’horizon. Et hop, lever le pied.
Pointe de pied tendu, haut hisse le mollet !
Tourner la cheville et PAF le talon ! Poser le pied, planter la pointe.
Tu la doubles. Double là je te dis !
Tu dois passer devant, tu vas plus vite, tu n’as pas peur.
Toi, tu ne t’arrêtes pas.
Tenir la stature, planter les orteils dans les pâtures.
Nord cap Nord !
Du tendon au mollet tendu, surtout ne pas tomber, jamais flancher…
Regardez ! Là ! Il ne bouge pas. Sa jambe droite plus courte que sa jambe gauche.
Déséquilibré !
J’attends tendu, pentu. Trouvant mon équilibre dans la pente obtuse.
Remonter la pente, qu’ils disent, je dois remonter la pente. Me retenir pour ne pas tomber et cogner, voler… Rouler bouler …
Le verdict est tombé, ils ont goudronner la pente. Déséquilibrés!
J’entends encore le bruit de la déconstruction, un cliquetis de pierres net, sec et ma vision
saturé de blanc. Pas une silhouette, du blanc, juste du blanc… Un fracas de poussière blanche.
Tout est blanc et ça fait deux minutes vingt-cinq. Encore, toujours… le bruit des pierres brisées.
Le son de la poussière coule par mes oreilles, à mes pieds, entre mes orteils, le long de ma
jambe. Du sable, un désert se forme, gris nacré, il s’étend maintenant à plus de 10 kilomètres.
Je sue à grosses gouttes. Loin, elle approche…
Elle est à deux mètres vingt-cinq de moi. Mais je ne vois plus rien, juste son sourire :
“Tout va bien”.
Soudain elle s’arrête, contre moi, contre rien. Elle se rassemble, s’empile, se serre et les morceaux d’elle s’amoncellent.
Ça y est c’est en moi que ça bouge ?
Nous nous sommes finalement rencontrés… Rapidement vu, rapidement su. Nous avons échangé deux mots, puis trois puis rien. Enfin rien…Plus de mots en tout cas.
La frontière était net, une fois traversée c’était rapide.
Il n’était plus question de s’arrêter.
Fini les tambours, les tracas, les maracas. Depuis hier, je n’entends plus rien… Je m’accroche aux derniers bruits de chocs.
Le rythme… j’ai perdu le rythme.
Qu’est ce que je dois suivre ?
Ce matin j’ai de suite pensé à toi, mais loin… Je ne sentais plus rien.
Glissement de terrain…
Je suis en bas maintenant. Fini les éclats ! Les fracas ! Putain de pente glissante.
J’ai atterri sur la bonne face du triangle. Maintenant j’y reste.