Ça va, vous êtes bien à votre place ?
Mais comment avez-vous su que c’était votre place ? Je veux dire que c’était vraiment votre place là ?
Je vous demande ça parce que je sais qu’ici c’est placement libre et moi, ça m’a toujours mise mal à l’aise le placement libre.
Mais vous, ça va ? Vous avez choisi, librement, et vous avez pensé que là, précisément, ce serait une bonne place. Remarquez, juste à côté, le point de vue est sensiblement le même, le siège pas moins confortable mais ce n’est pas là… c’est juste à côté. Et pourquoi pas carrément plus haut ? ou plus à droite, plus à gauche ? Vous aviez le choix puisque… c’est placement libre.
Vous voyez moi, je préfère quand c’est numéroté. Au moins y’a pas d’question à se poser, pas de choix à faire, pas d’arbitrage ni de compromis. C’est là où on m’a dit de me mettre, c’est comme ça, c’est simple. Et puis c’est quand même bien pratique d’être placé par d’autres ; on n’a pas peur d’être déplacé, de prendre la place de quelqu’un d’autre, d’avoir à céder sa place. On te dit ta place c’est M13 et ça sert à rien de te demander si C12 ça aurait pas été mieux parce que C12 c’est pas ta place, c’est la place d’un autre. Tu es M13 et c’est bien comme ça. D’ailleurs je me dis que M13 c’est plutôt mieux que W31 alors M13 ça me va.
Peut-être que si dès le départ on m’avait dit ta place c’est AA20, je me poserais moins de questions aujourd’hui sur ma place dans la société. Peut-être.
Parce que moi dès le départ, on m’a dit… On m’a rien dit en fait… On m’a juste fait comprendre, qu’il fallait que je reste à ma place en essayant d’en prendre le moins possible.
Mais elle est où ma place ? Dans leurs silences assourdissants, dans leurs non-dits étouffants, dans leurs regards baissés ? Elle est où ma place ?